Ces écuries privées qui ont joué dans la cour des grands

La Formule 1 a toujours servi de vitrine aux grands constructeurs automobiles. De bonnes performances sur les circuits permettent de faire briller la marque dans les esprits. Cependant, les fabricants ne sont pas les seuls à lutter sur la grille : au cours des années, de nombreuses écuries privées ont pu lutter et tenir tête aux grands noms de l’automobile. Ces structures ne sont pas soutenues par les grands constructeurs et sont financées par des fonds privées, mais elles ne sont pas pour autant présentes pour faire de la figuration.

En 1988, sur le Paul Ricard, Senna et Prost se livrent une nouvelle bataille. McLaren comptera dixd oublés cette saison et éccrasera la concurrence : 1988 reste la saison la plus dominée de l'histoire de la F1.
Ayrton Senna et Alain Prost, deux pilotes de légende dans une marque devenue un symbole de la F1 (©DR)

McLaren (1966 – présent)

L’écurie britannique, basée à Woking, est devenue, au fil des années, l’une des équipes les plus légendaires du sport. Fondée par le pilote Bruce McLaren (vice-champion du monde 1960 avec l’écurie Cooper), la première monoplace orange prendra le départ de son tout premier Grand Prix en 1966, dans les rues de Monaco. C’est le fondateur de l’écurie en personne qui prenait place dans le cockpit, et deux ans après les débuts de son équipe en F1, Bruce McLaren remportait son premier Grand Prix pour sa propre écurie, à Spa. À cette période là, McLaren est encore une équipe récente mais dispute de nombreux championnats, de l’Australasia Tasman Series dès 1964 jusqu’à ses victoires à l’Indy 500 en 1972, 1974 et 1976. Son fondateur, en revanche, perdait la vie dans un accident lors d’un test, en 1970.

Cependant, la mort de Bruce McLaren n’allait pas entraver la progression de la structure. Teddy Mayer prend les commandes et l’écurie et remporte son premier titre constructeur en 1974, tandis que les pilotes Emerson Fittipaldi et James Hunt décrochaient la couronne des pilotes en 1974 et 1976. Cinq ans plus tard, la marque fusionne avec le Project Four Racing, détenu par Ron Dennis : la machine McLaren était sur les bons rails pour dominer. Entre 1984 et 1998, l’écurie remportera sept titres constructeurs et aura vu les plus grands noms de la F1 courir sous ses couleurs : Ayrton Senna, Alain Prost, Niki Lauda, Mika Häkkinen… En 1988, McLaren allait d’ailleurs asséner un coup de massue sur la concurrence : ses pilotes, Senna et Prost, allaient remporter quinze des seize épreuves du championnat et marquer un total de 177 points (pour un maximum de 180, seuls les onze meilleurs résultats comptant au classement). Avec dix doublés, 1988 est l’année la plus dominée dans l’histoire de la F1.

Avec le temps, McLaren s’est également lancée dans la production de voitures de luxe. Il s’agit de la seule écurie privée qui s’est transformée (ou du moins, diversifiée) en constructeur automobile. La première voiture fut la McLaren F1, commercialisée en 1992. Côté sportif, les monoplaces oranges sortent d’une période difficile et ont renoué avec le podium à Interlagos l’an passé. Cependant, les résultats restent loin des standards de la marque, et le but reste de retrouver les sommets. Le dernier titre remonte à 1999, quand Mika Häkkinen s’emparait de sa seconde couronne.

Williams (1975 – présent)

Autre écurie privée à avoir connu le Graal, Williams a fait son arrivée plus tard dans la discipline reine. Elle reste cependant la troisième écurie en terme de Grands Prix disputés (744) et de victoires (114). L’écurie est née en 1966 sous le nom de son fondateur, Franck Williams Racing Cars, et préparait des châssis Brabham qu’elle engageait en F2 et F3. C’est en 1975 que l’écurie fera ses premiers tours de circuits en F1 : à l’époque, Williams est un constructeur à part entière et s’allie avec le milliardaire Walter Wolf pour prendre part au championnat.

La saison 2019 fut la pire dans l'histoire de Williams. La voiture était trop lente, et était même considérée comme une "Formule 1.5", à cheval entre la F1 et la F2.
Les difficultés actuelles ne doivent pas faire oublier les succès des décennies passées (©Williams)

Cependant, deux ans plus tard, Wolf pousse Williams vers la sortie : l’Anglais ne baisse pas les bras et fonde de nouveau son écurie, baptisée Williams GP Engineering. Et les succès ne tarderont pas à arriver : en 1979, Williams remporte son premier Grand Prix à Silverstone, tandis qu’Alan Jones devient champion du monde l’année suivante et offre le titre constructeur à son équipe. Entre 1980 et 1997, la structure basée à Grove remportera neuf titres de champion constructeur. Et comme chez McLaren, les plus grands champions auront connu leurs moments de gloire : Alain Prost remportera le titre des pilotes en 1993 dans une monoplace au système de suspensions actives (qui permettait de gagner une seconde au tour), Nelson Piquet et Nigel Mansell feront vibrer les fans tout en donnant des sueurs froides à leur équipe, tandis que Jacques Villeneuve remportait un duel acharné face à Michael Schumacher en 1997.

Depuis 2017, l’écurie ne cesse de descendre au classement. Malgré quelques podiums au milieu des années 2010 avec Felipe Massa et Valtteri Bottas, les grands pilotes fuient désormais Williams, qui aligne des pilotes peu expérimentés. La saison dernière fut probablement la pire dans l’histoire de l’écurie, avec un petit point marqué en Allemagne grâce à une pluie d’abandons et la disqualification des Alfa Romeo. Totalement larguées durant la saison, George Russell et Nicholas Latifi ont pourtant assuré que la version 2020 de la monoplace montrait des signes encourageants.

Stewart Grand Prix / Jaguar / Red Bull (1997 – présent)

Une écurie bien plus récente, mais qui a également connu son heure de gloire. Créée par le triple champion du monde Jackie Stewart, l’écurie dispose de moteurs Ford et remportera son premier (et unique) Grand Prix en 1999, quand Johnny Herbert saisissait sa chance sur le Nürburgring. L’une des courses les plus folles de l’histoire : après un véritable carnage dans le premier tour, la pluie s’invitait à la fête, tandis que quatre leaders furent contraints à l’abandon ! C’est donc l’Anglais, qui fut l’un des premiers à chausser les pneus pluie, qui s’imposait en Allemagne.

Créée par le triple champion du monde britannique Jackie Stewart, l'écurie qui portera son nom connaîtra un succès en F1, en Allemagne. L'écurie sera plus tard rachetée par Ford, mais ses résultats décevront : Red Bull prendra le relais en 2005.
Stewart GP deviendra Jaguar en 2000, puis Red Bull en 2005 (©DR)

Mais à la fin de la saison, Ford rachète l’écurie et la renomme Jaguar. S’ensuit une période pauvre en résultats pour la firme britannique : de 2000 à 2004, l’écurie ne montera sur le podium qu’à deux reprises, tandis que la situation dérapait en interne. Niki Lauda, arrivé en 2000 dans l’écurie, se faisait lui-même éjecter de la direction après avoir exclu Pedro de la Rosa et Eddie Irvine. Le court passage de l’écurie en F1 restera mémorable pour ses livrées, mais surtout pour son diamant… Placé sur le nez de la monoplace à Monaco ! Alors que le joailler Steimetz devient partenaire de l’écurie, Jaguar profite du Grand Prix de Monaco 2004 pour mettre le paquet : le constructeur haut de gamme placera un diamant d’une valeur de 300 000 dollars sur son nez. C’était sans compter le crash de Christian Klein : le matériau ne sera jamais retrouvé.

En 2005, Ford vend l’écurie à Red Bull. Un grand chantier attend les hommes de Dietrich Mateschitz pour mener l’écurie vers les sommets. Mais avec de très bons pilotes (notamment David Coulthard) et l’arrivée d’Adrian Newey en 2007, Red Bull grimpera petit à petit dans la hiérarchie. Après des premières années compliquées, la firme autrichienne connaîtra sa période de gloire au début des années 2010, avec huit titres en quatre ans. Durant cette période, les saisons 2011 et 2013 furent dominées de la tête et des épaules par le prodige de l’écurie, un certain Sebastian Vettel. Depuis, l’écurie subit la réussite de Mercedes mais collectionne tout de même les victoires et les podiums : outre 2015, Red Bull a toujours remporté au moins un Grand Prix par saison, et a également propulsé des pilotes sous les projecteurs, comme Daniel Ricciardo ou Max Verstappen, qui est le présent mais surtout le futur de la F1.

Benetton (1986 – 2001)

En 1986, le propriétaire de la marque de prêt à porter Luciano Benetton rachète Toleman, l’écurie qui a lancé Ayrton Senna dans le grand bain de la F1. Dans la lignée de l’écurie britannique, c’est cette structure qui mènera Michael Schumacher vers ses deux premiers titres mondiaux et qui révèlera Flavio Briatore aux yeux du grand public.

Bien que Michael Schumacher soit lié à Ferrari dans l'esprit de chaque fan de F1, c'est bien avec Benetton que la légende du sport automobile remportera ses deux premiers titres mondiaux, en 1994 et 1995.
Michael Schumacher remportera ses deux premières couronnes avec Benetton (©Autoplus)

L’équipe basée à Enstone disputera au total seize saisons pour trois titres (deux pilotes et un constructeur, en 1995). De nombreux pilotes de renom rouleront pour ces monoplaces, comme Michael Schumacher donc, mais également Nelson Piquet, Riccardo Patrese, Gerhard Berger ou encore Jean Alesi, qui décrochera sa seule victoire en F1 avec cette écurie. Le champion du monde Jenson Button fera également ses débuts avec l’équipe, en 2001.

Avec l’Italien Briatore aux commandes, l’écurie connaîtra un pic de succès au milieu des années 90, avant de descendre progressivement dans la hiérarchie. Jamais plus bas que septième au classement constructeur, le bilan reste tout à fait honorable avec 27 succès (neuvième équipe la plus prolifique de l’histoire de la F1). En seize saisons, Benetton montera d’ailleurs à huit reprises sur le podium des constructeurs. L’écurie sera finalement rachetée par Renault, et le nom Benetton disparaîtra des radars en 2002. La suite n’est qu’histoire : la firme française ira chercher ses titres mondiaux en 2005 et 2006, avec Fernando Alonso derrière le volant.

Brabham (1962 – 1992)

Une autre écurie historique qui aurait pu connaitre un parcours similaire à celui de McLaren ou Williams. En 1962, l’Australien Jack Brabham, soutenu par son frère, s’unit avec l’ingénieur en aéronautique Ron Tauranac pour lancer sa propre écurie. Dès son deuxième Grand Prix, celui qui a déjà remporté deux titres de champion du monde avec Cooper terminera quatrième et deviendra donc le premier à marquer des points au volant d’une monoplace conçue par le pilote en personne. Il faudra attendre quatre ans et un changement de réglementation au niveau des moteurs pour que le pilote décroche sa première victoire.

Personnage symbolique qui ne laisse personne indifférent, Bernie Ecclestone a joué un rôle important dans les succès de Brabham.
Bernie Ecclestone, connu pour avoir été le patron de la F1, a occupé le poste de directeur de Brabham entre 1972 et 1987 (©Drivetribe)

En 2020, et bien que l’écurie ne soit plus en Formule 1 depuis près de 30 ans, Brabham reste un nom légendaire. Septième écurie qui compte le plus de succès (35) et sixième en nombre de départs (394), de grands noms du sport ont piloté pour la structure basée à Milton Keynes, où se situe aujourd’hui le centre de conception de Red Bull. Graham Hill, Jochen Rindt, Jacky Ickx, Carlos Reutemann, Niki Lauda ou encore Nelson Piquet boucleront plusieurs Grands Prix au sein de l’organisation. Mais les symboles du sport n’étaient pas que dans un baquet : Bernie Ecclestone, qui restera sans doute le patron le plus emblématique de la F1, était directeur de l’écurie avant de créer le Formula One Group, aujourd’hui chargé de la promotion et de la diffusion de la F1 dans le monde.

Le bilan de Brabham est tout à fait positif : l’écurie a remporté deux titres constructeurs et quatre pilotes. Malheureusement, les dernières saisons seront très délicates, avec une huitième place, deux neuvièmes et deux dixièmes entre 1986 et 1992. L’écurie devra mettre la clé sous la porte pour des problèmes financiers.

Et les autres ?

Au final, assez peu de constructeurs se sont lancés dans l’aventure F1. Dans les années 50 et 60, lancer sa propre écurie était bien plus courrant et moins coûteux, ce qui favorisait la réussite (à l’image de McLaren, Williams ou Brabham). Aujourd’hui, les dépenses sont bien plus élevées : le travail que réalise Haas, dernière écurie privée à avoir rejoint le plateau, est déjà phénoménal. Malheureusement, nombreuses sont celles qui ont échoué : dans les années 2010, HRT, Marussia ou encore Caterham sont des exemples marquants. Un constat accablant qui a motivé la prise de décision : la réduction des coûts, prévue désormais pour 2022, doit soutenir les petites écuries privées, qui sont vitales au championnat du monde.

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